Julie et les farfadets
Julie est son tendon d’Achille, celle pour qui il déroge aux règles qui le préserve de ceux qu’il chasse ou le chasse. L’attention qu’il lui porte pourrait un jour lui être fatal. Il a certes brouillé les pistes, personne ne devrait trouver le chemin qui mène à la petite chose si fragile qui pourrait le tuer. On ne peut être sûr de rien. Mais, qu’a-t-il à offrir de plus que sa vie ? Cette relation lui convient. Subvenir aux besoins de Julie, dans cette maison spécialisée, sans rien recevoir en retour. Qu’en ferait-il ? L’intérieur de ses mains est calleux, d’avoir trop caressé le cuir des bêtes sauvages. Le dos patiné des coups qu’il a reçu parce qu’il considérait qu’il ne pouvait et ne devait pas faire autrement. Qu’en ferait-il ?
Elle aime les petits bonbons à la menthe sauvage. Il lui en glisse parfois un dans la bouche et elle le dissout en le faisant roulé sur la langue. Elle sourit ensuite de toutes ses dents blanches en soufflant une haleine fraiche et sucrée. Lorsque les rideaux sont tirés afin de la préparer à la sieste et qu’un rai de lumière laiteuse découpe la pièce en deux, elle regarde danser les farfadets de poussières de la chambre et cherche à en attraper un. Puis le sommeil la prend, son corps s’écrase, se fossilise au creux du matelas : L’Eunuque décide alors de partir.
Il enfonce son chapeau sur son crâne poivre et sel, et sort d’une démarche légèrement chaloupée, le souvenir permanent d’un écrasement des lombaires L4, L5, qu’une chute de quelques étages aura provoqué.