C’est moi qui l’aie tué

Publié le par L'Eunuque

Berth ne dormait pas non plus. Marie quant à elle, avait glissé petit à petit vers l’épaule du jeune homme. Il entendait la respiration et sentait parfois le souffle chaud sur son avant bras. Il n’avait jamais été aussi proche physiquement de quelqu’un et même si certaines sensations étaient agréables, le reste était un immense malaise. C’est pourquoi il prit délicatement la tête de la jeune femme, la laissa glisser jusqu’au lit sur lequel ils s’étaient installés. Il lui allongea les jambes et la couvrit d’un drap. La fraicheur de la nuit avait envahi la pièce, mais ce n’était pas encore suffisant.  Berth sentait dans ces mains, sur son visage et dans sa poitrine, une immense chaleur. Son sang bouillonnait. Même s’il ne voulait pas en convenir, il aimait cet état, cette excitation. De la fenêtre, et grâce au retour de la Lune, il apercevait au loin la silhouette de l’église de Fondettes. Quelque part, par là, il savait que quelqu’un pensait à lui, qui tout comme lui ne dormait pas, trouvant la nuit trop longue.

Il devra l’affronter, autant que son passé, avait-il dit. Puis il lui avait spécifié qu’il lui faudrait du courage. Chacun à sa version de la vérité et chacun pense détenir la part la plus importante de celle-ci. La vérité comme un secret que l’on n’a jamais partagée avec personne est une torture. C’est sans doute ce que ce Paul Bouvet voulait. Se libérer de ce poids. Y avait-il de la rédemption dans l’air, ou était-ce la haine qui poussait cet homme à vouloir rencontrer Berth, afin de lui apprendre des choses contraires, des contre-vérités. « Il est dangereux, très dangereux » avait insisté Michel Joffre. Physiquement, Berth ne doutait pas d’avoir le dessus, mais en face il y avait l’expérience. Quelqu’un qui avait manié la violence au point de rendre méchant, un gentil garçon comme Julien Ménard. C’était un ancien légionnaire. Un type qui en a vu et qui en a tué plus d’un. Il ne se posera pas de question, s’il juge qu’il doit assassiner l’adolescent.

Il avait entendu remuer puis quelques secondes plus tard, deux mains s’étaient posées à plat sur son dos ainsi que le visage de Marie.

— Votre cœur bat vite et fort. Qu’est-ce qui vous préoccupe ?

— Rien.

Elle n’avait pas insisté.

— Je vais faire mon tour d’inspection. Allongez-vous et dormez un peu.

Il l’avait entendu sortir de la pièce. Puis, au bout d’une minute revenir en courant.

— Venez m’aider, mon dieu, une des petites est bouillante et elle ne se réveille pas.

Arrivé à son chevet.

— Vous pouvez la prendre avec vous, je vais réveiller mon grand-père, il faut l’amener à l’hôpital.

Ils descendirent ensemble et pendant que Marie allait demander de l’aide à Orfeuille, Berth attendait dans l’entrée.

Orfeuille descendit à son tour, en réajustant son pantalon. Il ne fit pas attention à Berth, mit sa main sur le front de la petite. Il y avait beaucoup d’inquiétude dans le regard du vieil homme. Il fouilla ensuite dans l’armoire à clefs en jurant de ne pas trouver ce qu’il voulait puis enfin, il fit signe à Berth de le suivre au même instant où revenait Marie. La fillette, le vieil homme et sa petite fille s’engouffrèrent dans la voiture. Le véhicule ne mit pas de temps à partir. Le jeune homme resta seul sur le perron.

Jean-Claude arriva torse nu, ayant entendu tout le remue ménage.

— Qu’est-ce qui se passe, demanda-t-il ?

Puis se rendant compte qu’il parlait à Berth :

— Et puis qu’est-ce que tu fous encore là toi ?

Il ne lui répondit pas.

 

La dernière indication avait été la bonne. Peu de personne savait vraiment où habitait Paul Bouvet. La description qu’on lui avait faite de la maison ressemblait à celle qui se présentait devant lui. La porte était entrouverte. Il frappa.

— Entrez et fermez derrière vous.

Il faisait sombre dans la maison. Un homme l’attendait assis à la table du salon. Il lui désigna une chaise.

— Asseyez-vous, dit-il doucement.

Voyant l’adolescent hésiter, il insista avec autant de douceur, qui ne semblait pas être une ruse.

— Venez vous asseoir. Vous n’avez pas à vous méfiez de moi. Celui dont que vous avez le plus à craindre c’est de vous-même.

— Qu’ai-je à craindre de moi ?

— Vous semblez vouloir tout savoir des hommes, avant même de vous connaître. C’est une erreur que j’ai commise il y a quelque temps déjà et je la paie encore.

— Peut-être pas assez.

— Vous en jugerez après m’avoir écouté.

Berth alla prendre place.

— Savez-vous qui je suis ?

— Vous êtes Paul Bouvet.

— Non, je ne suis pas Paul Bouvet. Je m’appelle Adrien Vallençay.

Berth secoua la tête, refusant cette première révélation. Il chercha sur le visage de celui-ci les traits du jeune homme qu’il avait vu en photo, mais la brulure qui couvrait une partie du visage ne lui permettait pas d’être affirmatif.

— Tout le monde prétend que vous êtes mort.

— Apparemment non.

— Et… êtes vous mon père ?

— Non, je ne suis pas votre père, mais c’est moi qui l’aie tué.

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N
<br /> Merci :))<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Your Welcome.<br /> <br /> <br /> <br />
N
<br /> Oui...dans 30 minutes, je file au taf :(<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Bon courage !<br /> <br /> <br /> <br />
N
<br /> Me souviens de Pif le chien mais pas Pifou...<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Pif gadget : toute mon enfance. Mais, dîtes moi, vous êtes déjà debout ?<br /> <br /> <br /> <br />
N
<br /> Gloups :o !<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Pas glop, pas glop ! (Vous êtes peut-être un peu jeune pour avoir connu Pifou, dans "Pif le chien" ?).<br /> <br /> <br /> <br />
B
<br /> Allons bon!...V'là autre chose!Encore un étonnant rebondissement...quelle histoire!J'ai bien fait d'rattraper mon retard!Je m'accroche ;)<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Vous êtes dans le rythme, c'est bien ! Deux épisodes d'explications et on retrouve une vie moins compliquée, mais pas moins passionnante… j'espère.<br /> <br /> <br /> <br />