Un dernier tour et on n’en parle plus

Publié le par L'Eunuque

Tout le monde aimerait savoir à l’avance ce que le futur nous réserve. Pas forcément dans les détails, mais dans les grandes lignes. On ne veut pas forcément connaître le jour de sa mort, ni comment elle interviendra, mais ce qu’il y a juste après elle, quelques puisse être nos croyances ou notre non croyance, on y pense. De notre vivant, la mort apparaît comme une absurdité, un non sens, un gâchis. Mais, nous nous éloignons.

Si nous ne pouvons pas connaître à l’avance les actes de certaines personnes et si ces actes peuvent nous être préjudiciables, alors cela serait peut-être plus facile pour nous si nous amenions les autres à faire exactement ce à quoi nous nous attendions. C’est pas clair, non ? Oui ? Bon, alors continuons.

Deux jours après la visite chez les parents de Patricia, ex Mésange, L’Eunuque attendait tranquillement chez lui, assis sur la seule chaise de l’appartement, dans le salon, face à la porte d’entrée qu’il avait laissé entrouverte pour l’occasion. Il avait retiré sa gabardine et sa veste, relever les manches de sa chemise blanche. Il était assez serein. Le dénouement de toute cette histoire était en train de se faire. L’Eunuque aimait ce moment, ce calme. Il pouvait presque entendre les battements de son cœur sur ce rythme lent. Ces poumons se remplissaient, soulevaient sa poitrine. Il ne pensait plus à rien pas même à lui. Il n’était plus temps de douter. Ce qui est engagé a été voulu, décidé, pensé…

Son téléphone sonna. « ça y est, c’est parti », se dit-il.

— Ils sortent de chez moi, dit Le Chacal. J’espère qu’ils n’ont pas foutu le bordel ?

— Ils cherchaient les petits et Patricia, et rien d’autre.

— Ouais bah justement, lorsqu’ils ont vu qu’ils l’ont dans le cul, ils ont très bien pu se venger. En tous cas, la gonzesse dont nous a parlé l’autre con de Charlot n’était pas avec eux. Dommage, j’aurais aimé lui mater les miches, j’adore ces greluches genres salopes un peu bourges…

— Chacal, va donc voir s’ils n’ont pas chier sur ton canapé.

— Putain, j’espère pas.

Il raccrocha.

L’Eunuque entendit le bruit d’un briquet et une volute de fumée grise pénétra de derrière la porte.

— C’est ouvert, dit simplement L’Eunuque.

— J’ai vu, dit Astrid. Je peux ?

— Je vous en prie.

Elle poussa la porte. Elle n’était qu’une silhouette dans l’encadrement. Des jambes interminables qui auraient fait hurler à la mort un chacal si n’y avait pas dans l’autre main, celle qui ne tenait pas la cigarette, une arme avec un silencieux. Elle entra. On entendait à peine ces pas sur le paquet en bois. Elle resta sur le seuil de la porte du salon, s’appuyant d’une épaule d’un air plutôt décontracté.

— Vous m’attendiez, bien sûr, commença-t-elle à dire ?

— Oui. Ça vous étonne peut-être ?

— Si je vous disais oui, je serais pour le moins une conne à qui vous avez joué un sale tour.

— Je ne vous ai jamais sous estimé.

— Au final, ça revient au même. Vous m’avez baladée, fait croire que je n’étais pas repérée. Je pourrais être admirative si vos actes n’avaient pas des conséquences fâcheuses pour moi.

— Vous vous en remettrez.

Elle laissa tomber la cendre de sa cigarette sur le planché.

— Je pense que c’est inutile de vous demander où sont les enfants et leur mère ? De même que si l’on se rend chez les parents nous ne trouverons plus personne.

— Effectivement. Je ne le sais pas moi-même où ils sont actuellement. J’ai fait appel à des gens dont la discrétion est totale, tant et si bien que personne ne peut connaître la destination finale de leurs clients.

— Et tout cas, la destination finale de mes trois gars qui surveillaient l’appartement de votre Chacal, je crois la connaître.

— Détrompez-vous. Ils vous seront rendus bientôt.

Elle haussa les épaules.

— Vous pouvez les garder.

— Nous ne faisons pas de recyclage.

Elle réussi à sourire.

— Et vous ne voulez pas me donner Charles de Villemonde ?

­— Je l’ai envoyé au purgatoire. Il doit se repentir de ses actes passés. Il est en route pour l’Afrique où un petit dispensaire au fin fond du Sahel l’attend.

— Vous avez réussi à le convaincre ?

— C’était ça ou vous. Il n’a pas hésité un instant.

Elle dévisagea cet homme qui imposait un charisme étrange. Personne, jusqu’à aujourd’hui n’avait réussi aussi bien à la duper. La fugue de De Villemonde n’avait pas vraiment une fugue car il avait été rapidement retrouvé. Le Cube avait estimé qu’il lui serait plus utile en dehors de l’organisation que dedans.

— Vous êtes très fort.

— Vous m’avez surtout mal jaugé et votre suffisance a fait le reste.

— Ce n’est pas très gentil ça.

— Je suis tout sauf gentil.

Elle remballa son arme.

— Je vais vous laisser, dit-elle en amorçant une retraite.

— Je ne vous raccompagne pas.

Et elle disparu.

Quelques minutes plus tard, le téléphone de L'Eunuque sonna.

— Monsieur le Comte de Saint Elm vous fait dire que les colis sont arrivés à destination.

— Vous remercierez Monsieur le Comte pour moi.

— Je n’y manquerais pas Monsieur. Ah, oui, selon vos instructions, les trois touristes sont repartis sains et saufs.

— Encore merci.

Il raccrocha.

« Voilà, se dit-il simplement, C'est terminé ». Comme à chaque fois, il ne ressentait aucune satisfaction et encore moins de fierté. Sur le moment, il avait envie de boire un café. Il n’avait pas eu le temps d’aller voir le père Gaubert ce matin, alors il décida de s’y rendre maintenant.

Il attrapa sa veste et son chapeau et sorti de chez lui.

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Commenter cet article
A
<br /> "Toutes les bonnes choses ont une fin. Sauf le saucisson qui en a deux."<br /> Moi par contre contrairement à l'Eunuque, j'ai pris le temps de boire un ptit café noir bien amer et fumant en me délectant de tes mots.<br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> <br /> Il n'y a même pas une cafetière chez L'Eunuque, et Georges ne vient pas souvent.<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> oh non ce n'est pas fini ??<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Le phoenix ne renaît-il pas de ses cendres ? La vie n'est pas qu'une seule grande aventure, mais des centaines mises bout à bout.<br /> <br /> <br /> <br />